C/D, T2, premières et deuxièmes côtes… Au risque d’avoir une vision chiropractique on pourrait les ajuster chez chacun de nos patients (petite pique amicale ;p).

Oui ces techniques sont efficaces mais la récidive est pourtant très fréquente. On évoque alors une respiration thoracique avec une hypertonicité des scalènes, une flexion excessive des hautes thoraciques, une pauvre posture au bureau ou encore des lésions viscérales, notamment intrathoraciques…

« Et si la vérité était ailleurs, mon cher Mulder ? »

Qu’en est-il des insertions antérieures des premières côtes ? Pourrait-on parler d’effondrement de la manubrio-sternale ? Peut-on corriger structurellement une lésion manubrio-sternale ? Peut-on recommander une telle technique si anatomiquement elle sort des compétences ostéopathiques mais que son efficacité est libératrice pour le patient ?[poll id= »21″]

Rappel anatomique

L’articulation manubrio-sternale semble varier en fonction des individus et de leur âge. Elle est parfois décrite comme une sychondrose, la jonction entre les 2 os étant alors une lame de cartilage hyalin qui tendrait à s’ossifier avec l’âge (vers la trentaine) devenant ainsi une synostose et d’autres fois elle est décrite comme une amphiarthrose ou symphyse lui reconnaissant ainsi « un peu plus de mobilité ». (voir ici)

L’angle que forme le sternum et le manubrium est appelé angle de Louis et avoisinerait les 140°.

Sur la partie manubrium on retrouve l’articulation sterno-claviculaire, l’insertion de la première côte et la partie supérieure de l’insertion de la 2ème côte.

On s’aperçoit rapidement que cette zone manubrio-sternale est très intéressante ostéopathiquement parlant car les premières côtes sont intimement liées avec les hautes thoraciques. Leurs petites tailles limitent leur capacité compensatoire intrinsèque ce qui fait qu’une restriction frontale aura une influence dorsale immédiate et importante.

Il serait inutile d’insister sur l’importance de la S/C, qui rappelons le est la seule articulation reliant tout le membre supérieure au reste du corps…

Description de « l’effondrement » manubrio-sternal


Il existe différentes dysfonctions somatiques possibles dans cette région, lésion de la première côte, de la seconde, de la S/C, mais il y en a une qui n’est pas souvent décrite et qui serait intéressante de soulever est la lésion de la manubrio-sternale. Pourrait-on notamment parler « d’effondrement » de la manubrio-sternale ? L’effondrement de la M/S serait une diminution de l’angle de Louis ou une lésion en extension du manubrium. Serait associé à cet effondrement une lésion récalcitrante en flexion des hautes thoraciques. Le conditionnel est utilisé car comment peut-on parler de la dysfonction somatique d’une articulation qui n’est pas censée posséder de mobilité notable ?

La motivation de l’écriture d’un tel article n’est pas de rappeler au lecteur-étudiant-ostéopathe d’accorder une importance particulière aux fixations antérieures qui pourraient restreindre la mobilité des hautes thoraciques (il le sait certainement déjà), mais d’alerter sur le fait que cette articulation peut dans certaines conditions être corrigée structurellement. Mais corriger ‘structurellement‘ une articulation qui n’est pas censée posséder de mobilité articulaire suffisante devient quelque peu problématique et soulève des questions déontologiques ?!?!

Mal-Heureusement l’Aléa thérapeutique fait parfois les choses étrangement. Plusieurs fois il est arrivé que la manubrio-sternale de certains patients trouve leur solution de continuité sous la contrainte d’une technique par une flexion soudaine et surprenante (ou une dépression de la M/C). surprenante car l’intention de la technique n’était certainement pas de créer une telle correction structurelle sur cette articulation.

Lorsqu’un tel ajustement arrive, le patient est aussi (si ce n’est moins) surpris que le thérapeute. Pour ajouter à l’étrangeté de la chose le changement tissulaire au niveau des hautes thoraciques est alors impressionnant: le jour et la nuit.

Mais peut-on recommander une technique qui dépasserait les limites des compétences ostéopathiques ? Ou faudrait-il plutôt en parler et prévenir du ‘risque’ qu’une solution de continuité articulaire peut surprendre la main du thérapeute ?

Différentes techniques

Les différentes techniques avec lesquelles une correction structurelle de la M/S peut subvenir

En position assise :

Le thérapeute est derrière le patient (qui est assis) et plaque le corps du patient contre le sien. Ses mains et doigts viennent travailler les insertions frontales des premières côtes tout en amenant le corps du patient en rotation ou en extension. Il se peut qu’en insistant sur la M/S qu’elle puisse « cèder ».

En décubitus dorsal :

Le patient sur le dos et le thérapeute travaille sur le médiastin, notamment au niveau de la M/S en y apportant une pression antéro-postérieure lors d’un déroulement fascial par exemple.

Conclusion

Il faut insister sur le caractère imprévisible et surprenant de cette correction ou de cette solution de continuité. La main du thérapeute est littéralement surprise par cette mobilité articulaire soudaine.

La définition anatomique ne peut pas encourager à vouloir corriger intentionnellement de cette manière la sterno-manubrium. Préférez une approche indirecte sur les espaces intercostaux, en recoil, en BLT, en fonctionnel sur les insertions costales ou même la M/S. Remettre en question une approche structurelle directe sur la M/S n’est pas à ignorer.

On ne pourrait qu’insister sur le caractère imprévisible de la réaction articulaire de la manubrio-sternale sous une contrainte mécanique. Aussi si vous persistez à utiliser les techniques à risque décrites ci-dessus, il est préférable que vous pliez vos coudes (pour la technique en décubitus) pour être très réactif en retirant ses mains et par conséquent faire une sorte de recoil structurel si cela subvenait. L’autre impliquant les doigts, est moins problématique car ils sont eux-mêmes de nature très réactive.



Si malgré ces précautions, la M/S venait à céder structurellement, ne pas paniquer ! Expliquez à votre patient que cette articulation n’est normalement pas censée bougée à ce point-là mais que ça peut arriver car elle peut avoir des variations  anatomiquement parlant selon les individus. Le prévenir qu’il est possible qu’il l’a ressente pendant une petite semaine à cause de sa nature anatomique (AINS/ice pack ?). Par la suite testez la mobilité des hautes thoraciques et notez l’impressionnante amélioration de mobilité tissulaire ainsi qu’au niveau de la mobilité des cervicales.

En aucun cas Ostéopathie-64 ne préconise un tel ajustement articulaire, il s’agit plus d’un guide de conduite et de précaution au niveau d’un aléa thérapeutique qui peut survenir au niveau de l’articulation manubrio-sternale.